mardi 22 septembre 2020

Un mystère antédiluvien...

L'un des incontournables des anciens cabinets était le "triptyque des orbes", qui était constitué de trois objets forts mystérieux pour l'époque : le fruit de bois (noix de coco), les hanaps de sirènes (coquilles de nautile) et les oeufs de Rokh (oeufs d'Aepyornis fossilisés). Jusqu'à présent, je n'avais que le premier, mais voilà que je viens de recevoir le second.      



Les nautiles sont des mollusques de la famille des céphalopodes pourvus d'une coquille spiralée. Leurs tentacules sont beaucoup plus nombreux (environ 90) que ceux de leurs cousins. Ils se déplacent par réaction en projetant de l'eau via un entonnoir. Ils peuvent également ramper lorsqu'ils se trouvent sur un sol solide.




On les trouve près de certaines îles du Pacifique et au large des côtes australiennes. Ils abondent à environ 400 mètres de profondeur mais remontent souvent pendant la nuit, et se nourrissent de déchets organiques.


Ce groupe a connu un grand succès évolutif au Paléozoïque et au Mésozoïque, avec des milliers d'espèces recensées. Les nautiles eux-mêmes ont très peu évolué depuis cette époque, d'où l'appellation désuète de "fossiles vivants".



ma propre ammonite

Dès le XVIe siècle, les coquilles de nautiles ont été très prisées par les collectionneurs et, en conséquence, sont souvent très richement montées. Souvent, la couche externe de la coquille sera dépouillée afin de révéler la surface nacrée située dessous. Les meilleurs artisans les transforment en objets d'art.










L'étude des nautiles soulèvera de nombreux questionnements sur l'évolution. On assistera même à des débats enflammés chez les malacologistes (spécialistes des mollusques) à savoir si l'étude des nautiles relève des conchyliologistes (malacologistes spécialistes des mollusques à coquille) ou des teuthologistes (malacologistes spécialistes des céphalopodes) et cela, jusqu'à provoquer un duel au pistolet (!), heureusement sans issue mortelle. 



Un malacologiste neutre fut alors chargé de faire une étude complète de l'espèce pour trancher la question.





Trois planches scientifiques de ladite étude


Il fut ainsi tranché que l'étude des nautiles relevait de la teuthologie, étude des pieuvres, calmars et autres cousins.


Pour mon propre spécimen, je me suis laissé inspirer par ce présentoir-ci :



 

...et j'ai tout simplement déposé mon nautile sur un porte-vase de laiton acheté à 2$ au Village des Valeurs.




  






vendredi 18 septembre 2020

Un mystère séculaire...

 Alors, en manchette aujourd'hui dans l'actualité scientifique québécoise, l'entomologiste Le Tirant et son assistant ont découvert que la femelle du "phasme-feuille" Nanophyllium. Ce mystère planait sur l'univers des insectes depuis plus d'un siècle et pourtant, la femelle était déjà connue de la communauté scientifique : il s'agit de Phyllium asekiense

Néanmoins, le dimorphisme sexuel est tellement marqué qu'on croyait que le mâle et la femelle étaient de deux espèces différentes.


(ceux de mon âge se souviendront de la scène mémorable du Déclin de l'Empire Américain où Rémy Girard pète sa coche à propos du dimorphisme sexuel chez les phasmes).


C'est en observant éclore des oeufs ce qui s'avéra être des spécimens mâles et femelles que Le Tirant a pu constater que ce qu'on croyait être deux espèces n'en formaient qu'une seule.



La femelle en A et B, le mâle en C


En général, je trouverais risible de donner le Journal de Montréal comme source de vulgarisation scientifique, mais je dois admettre qu'on y a publié un très beau tableau-résumé de la découverte et comme j'ai plusieurs lecteurs du primaire, je crois que ce lien leur donnera un aperçu très clair.


https://www.journaldemontreal.com/2020/09/18/linsectarium-resout-un-mystere-de-114-ans


Néanmoins, je me permets également de donner le lien vers le véritable article scientifique.


https://zookeys.pensoft.net/article/56214/


J'ai déjà parlé des phasmes ici...


https://excentriqueunivers.blogspot.com/2020/06/mais-quest-ce-que-tu-vas-faire-dun.html


...mais comme on m'a offert récemment un spécimen de phyllium (Phyllium hausleithneri femelle), je vais en profiter pour surfer un peu sur le sujet du dimorphisme sexuel.


Mon spécimen, dans une vieille horloge reconvertie en cadre circulaire 

(Village des Valeurs, 3$)...



...qui a aussi un dimorphisme sexuel marqué (femelle en A, mâle en B).




Dans mon cabinet, j'ai quelques éléments décrivant ce phénomène. J'espère un jour y consacrer un présentoir spécial mais pour l'instant, je vais me satisfaire de vous présenter quelques-unes de mes curiosités en attente d'être mises en valeur (aucun des spécimens ci-dessous n'est prêt à être exposé alors soyez indulgents.


Le dimorphisme sexuel peut s'exprimer par la présence de cornes servant à combattre les autres mâles. Ainsi, la femelle est assurée de s'accoupler avec le mâle le plus fort et d'obtenir les rejetons les plus vigoureux.


On peut observer ce dimorphisme chez les grands animaux...





(mon propre bois d'orignal, que j'attends d'accrocher)


...comme chez les plus petits.



Mes lucanes mâle et femelle.


Le dimorphisme existe aussi au niveau de la coloration. Le plus souvent, c'est le mâle qui sera le plus éclatant afin de montrer sa bonne santé, mais aussi d'attirer chevaleresquement l'attention des prédateurs sur lui plutôt que sur la femelle qui s'occupe des petits.


J'ai de belles plumes de canard colvert qui attendent d'être encadrées...  


...ainsi que le mâle et la femelle du papillon Dryocampa rubicunda.




Il existe également un dimorphisme de taille. Celui-ci est spécialement étonnant chez mon araignée Nephila pilipes.




Je vous laisse constater la différence entre le mâle et la femelle...








vendredi 11 septembre 2020

Quand sauter ne suffit plus...


Rhacophorus reinwardtii est ce qu'on appelle une "grenouille volante", bien qu'il serait plus juste de parler de "rainette planeuse". C'est un amphibien arboricole originaire des forêts denses tropicales allant de la Malaisie à l'île de Bornéo.


C'est un très bel animal, de couleur vert clair, tandis que ses doigts et ses orteils sont oranges, avec des palmes bleues. Malheureusement, comme beaucoup d'amphibiens et de reptiles, ses couleurs ont perdu de leur vivacité en séchant.


Elle passe l'essentiel de son temps dans les arbres où l'humidité de la jungle lui suffit. Elle est munie de ventouses sur les orteils afin de bien s'accrocher aux arbres. Moins habituel, Rhacophorus reinwardtii est également dotée d'une grande palmure aux doigts de ses quatre pattes. Cette palmure, une fois écartée, lui permet de planer de branches en branches, sur une distance de 10 à 12 mètres.



Autre adaptation défensive, elle peut asperger un agresseur avec le contenu de sa vessie, puis profiter de l'effet de surprise pour s'enfuir.


Les grenouilles volantes occupent exclusivement le Sud-Est asiatique.


jeudi 3 septembre 2020

Le Prince des Insectes (2) : comparaisons

J'ai reçu quelques demandes de comparatifs par rapport à la force du scarabée atlas.

Alors voici.

On se souvient que le Chalcosoma atlas peut soulever 85 fois son poids, c'est-à-dire cinq livres ou 2,26 kg.






Si Sylvester Stallone, à l'époque où il a joué Rocky, avait la même force qu'un scarabée Atlas, il aurait pu soulever un camion comme celui-ci, chargé de pierres à capacité maximale.




Si un éléphant d'Afrique avait la force d'un scarabée Atlas, il pourrait soulever ce four à coke de 500 tonnes ainsi que la machinerie qui le transporte.




Ainsi, je vous laisse à nouveau méditer cette citation de Darwin : "S’il était possible d’imaginer un mâle de Chalcosoma [...] qui aurait la taille d’un cheval ou simplement celle d’un chien, il deviendrait l’un des animaux les plus impressionnants de la planète".

mercredi 2 septembre 2020

Le Prince des Insectes

Me voilà de retour !

Au cours de l'été, mon cabinet a presque doublé de volume (je parle en termes d'inventaire, et non, malheureusement, en termes de pieds carrés --- la pièce aura bientôt atteint sa capacité maximale). Parmi mes nouveautés, j'ai démarré une "série" d'inspiration victorienne où les spécimens sont exposés comme jadis. Le premier spécimen de cette collection est un scarabée atlas (Chalcosoma atlas).


Il s'agit d'une espèce de grands scarabées-rhinocéros, parmi les plus grands des scarabées du monde. Son nom évoque le titan Atlas qui, dans la mythologie grecque, tenait la voûte du monde sur ses épaules. On rencontre cette espèce en Inde orientale, en Indochine, en Malaisie et en Indonésie.


Il s'agit de l'un des insectes des plus robustes et des plus fort du monde ; proportionnellement à sa taille, il s'agit de l'un des animaux les plus forts de la planète, bien davantage que l'éléphant.  Ce scarabée est capable de soulever ou de renverser 85 fois son poids, soit une charge cinq livres. Pour vous donner une image parlante, cet insecte pourrait donc soulever ceci :


Les cinq en même temps !

Les Kayapos considèrent le scarabée rhinocéros géant comme le chef de tous les insectes.Il est un symbole de protection, de force et de virilité. Et, chez certaines tribus, seuls les hommes importants du village pourront porter les colliers de têtes de scarabée, preuve de leur signification particulière.


Les cornes qui ornent la tête des mâles servent essentiellement à combattre ou chasser les prétendants aux femelles convoitées, certains de ces combats mènent l'adversaire défait tout droit vers la mort ! En Asie, ces coléoptères exercent une véritable fascination : dans certaines régions s’organisent des combats, dont les vainqueurs gagnent des sommes importantes.


La femelle, plus petite et dépourvue de cornes, ponds des œufs dans la matière végétale en décomposition (compost d'arbres, entre autre) et sa larve pourra prendre jusqu'à 3 ans de développement avant d'atteindre le stade adulte.


La larve est énorme et relativement agressive, pouvant attaquer ses congénères lorsque la nourriture se fait rare. Grillée, il s'agit d'un met de choix traditionnellement réservé aux guerriers avant un bataille importante. Votre humble serviteur a eu l'occasion d'y goûter lors d'un voyage : le goût évoque celui des pétoncles, un peu plus coriace mais plus sucré.


Les scarabées rhinocéros ont toujours émerveillé. Lorsque Charles Darwin vit pour la première fois un scarabée à cornes du genre Chalcosoma, il ne put s’empêcher d’écrire ceci :
« C’est leur petite taille qui fait que nous sommes incapables de nous représenter l’apparence des insectes. S’il était possible d’imaginer un mâle de Chalcosoma avec son armure de bronze poli et ses encornures complexes qui aurait la taille d’un cheval ou simplement celle d’un chien, il deviendrait l’un des animaux les plus impressionnants de la planète. »


La plupart des adultes, nocturnes, se nourrissent de fruits mûrs ou de sève. Les cornes serviraient principalement aux combats entre mâles pour l’accès aux femelles. Mais on pense que les mâles les utiliseraient aussi pour érafler le tronc des arbres et avoir accès à la sève.

Le scarabée atlas peut voler, certes pas aussi adroitement d'une libellule, mais parcoure de bonnes distances : pour vous donner un ordre de comparaison, pensez aux coccinelles ou aux hannetons.

Mon propre Chalcosoma atlas.

Une dame m'a vendu à prix symboliques (20$, autant dire qu'elle m'en a fait don) six spécimens d'arthropodes exotiques, soit quatre insectes et deux arachnides. 

J'ai fabriqué le présentoir en utilisant, comme d'habitude, un peu de créativité, d'huile de coude et divers matériaux de seconde main ou vendu à bas prix. Il s'agit, tout simplement, d'un chandelier de bois (85¢ à la Ressourcerie), deux sous-verres de bois (55¢ pour 6) et d'un petit bocal de verre (1,25$ au Dollarama). J'ai teint les pièces de bois pour les harmoniser et collé le tout à la KrazyGlue.




Temps investi : 1h
Montant investi : 2,65 $