mercredi 13 octobre 2021

Une vieille patte d'ours desséchée...

Désolé pour les amateurs de la célèbre galett' à ' m'lasse, mais c'est de paléontologie dont je vais vous parler aujourd'hui...



 Pfha ! de toute façon, ma grand-mère en faisait de bien meilleures...


L’une de mes plus belles trouvailles paléontologiques est cette patte incomplète d’ours à face courte, ou Artodus simus



Il a vécu surtout dans l’ouest de l’Amérique du Nord, de l'Alaska au Mexique, au cours du Pléistocène entre environ 1,8 million d'années et 10 000 ans avant le présent. Comme beaucoup d'autres espèces de l'ancienne mégafaune, cet ours géant a disparu à la fin du Pléistocène. Il s'agit de l'un des plus gros ours de tous les temps.




Contrairement à son cousin européen ursus spelaeus dont la dentition révèle un régime herbivore et charognard, notre ours à nous était doté de puissantes mâchoires et de dents impressionnantes, qui en faisait un chasseur dominant capable de tuer des proies de grande taille (probablement des bisons et des orignaux). Il s’agit du plus grand ours de tous les temps et je crois que de toutes les images du Web, celle de cette reproduction est la plus parlante.



Ma patte provient d’une zone fossilifère de Lévis, la Carrière St-Nicolas. 

JE SAIS : je viens juste de dire qu’on considère que l’ours à face courte vivait principalement sur la côte ouest. Je ne prétends pas révolutionner quoique ce soit : des présences occasionnelles de fossiles de mammifères de l’Ouest est consignée depuis longtemps sur le pourtour de l’ancienne mer de Champlain. Il semble que de petites populations de différentes espèces (comme aussi Panthera atrox, le fameux lion des cavernes) se soient installées autour de l’ancienne Mer de Champlain. 


La mer Champlain est une nappe d'eau saumâtre qui occupait les terres basses entre Québec et Cornwall, Ontario et remontait la vallée de l'Outaouais au cours de la période tardiglaciaire. La crue relative du niveau de la mer il y a environ 12 800 ans avait été provoquée tant par l'affaissement des terres sous le poids des glaces de l'ère glaciaire que par l'élévation du niveau de l'eau causée par la fonte progressive du glacier.


Comme, encore une fois, une image vaut mille mots, voici une carte de la mer de Champlain et un aperçu du niveau d’eau dans la région de Québec.




De toutes époques, les rives des grandes étendues d’eau ont eu leurs propres écosystèmes, amenant de petites populations animales à se déplacer pour profiter de la manne que les marées basses offrent en matière de poissons échoués. Notre Mer de Champlain n’y faisait pas exception ; ainsi, le Royal Ontario Museum m’a bien confirmé que cette découverte était normale.


Revenons d’ailleurs à ce fossile. 


C’est une dame du R.O.M. qui m’a aidé pour l’identification par de multiples courriels, des envois de photos avec des mesures précises dont on a dû m’expliquer la technique. Très gentiment, on m’a guidé dans l’identification. J’avais bien cerné qu’il s’agissait d’une patte d’ursidé mais je croyais à un ours noir ou, à la rigueur, un ours polaire juvénile. En réalité, c'est la patte d'une femelle juvénile d'Artodus simus



Correctement disposés, ces os vont ainsi…


(c'est là que je sors mes "talents" de photoshoper du dimanche)


…sur une patte reconstituée, ça donne ceci…



…et si j’avais la patte entière, ça aurait l’air de ceci (qui n’est PAS ma patte à moi).




Avec la chair et la fourrure, ce devait être encore plus impressionnant. Regardez la taille d'une main de grizzly comparée à une humaine...



...et essayez d'imaginer celle d'un ours à face courte en vous basant sur ceci...


 


Un gros merci à madame K. Taylor pour son aide précieuse et son sincère intérêt à encourager la paléontologie amateure. 

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