mardi 2 juillet 2019

Entomologie (1) : les monstres



Ma collection d’insectes, sans avoir la prétention d’égaler celle des vrais entomologistes, contient plusieurs spécimens dont je suis spécialement fier et d’autres, très communs, mais fascinants par leurs mœurs ou leur biologie.

Je consacrerai ce billet-ci à deux "bêtes de cauchemar" du Québec, c’est-à-dire mon léthocère d’Amérique et ma rhysse noirâtre.


Léthocère (Lethocerus americanus)

Le léthocère d’Amérique, ou punaise d'eau géante, est le plus gros insecte aquatique du Québec.

Celui-ci fut courageusement capturé (à l'aide d'un pot Masson) par mon intrépide amie Véronique, qui l’avait repéré dans sa piscine lors du grand nettoyage de printemps.



Il s'agit d'une vraie machine à tuer (je veux dire l'insecte, pas mon amie Véro). Il se nourrit à l'aide de pièces buccales de type piqueur-suceur qui forment une sorte de bec court et pointu, le rostre.  Il injecte une salive digestive puissante avec leurs pièces buccales, ce qui liquéfie la chair qu’il aspire ensuite. Sa piqûre est, de façon peu surprenante, considérée largement comme la plus douloureuse qui puisse être infligée par un insecte (sans être la plus dangereuse : on parle seulement ici de souffrance). Plus longtemps la punaise d'eau géante peut injecter sa salive, pire sera la douleur résultante, et alors que la salive liquéfie le tissu musculaire, elle peut causer de sérieux dommages permanents.


Ce sont des prédateurs féroces qui capturent et se nourrissent de crustacés, de poissons et d'amphibiens. Ils s’attaquent aux couleuvres, grenouilles, tortues et souris qu’ils paralysent puis entraînent sous l’eau pour les noyer.


Chez un humain adulte, la piqûre causera une vive douleur et un épisode de fièvre pouvant s’étaler sur quelques heures. Une tache sur la peau, à l’endroit de la piqûre, persistera plus semaines. Par deux fois aux États-Unis, un nourrisson a été tué par la piqûre d’un léthocère après avoir été atteint au cou, entraînant la liquéfaction de la veine jugulaire externe.



Rhysse noirâtre (Megarhyssa atrata)

Énorme insecte volant, la femelle de la rhysse noirâtre est dotée d’un impressionnant ovipositeur brun foncé mesurant de 12 à 15 cm de long. Elle s’en sert pour pondre à l’intérieur d’un autre être vivant.


La rhysse noirâtre est un ectoparasitoïde, c’est-à-dire qu’elle a besoin d’un hôte pour compléter son cycle vital. Il s’agit souvent de la larve du tremex. Celle-ci vit dans le bois, et la femelle utilise son long ovipositeur pour l’atteindre. La jeune rhysse se nourrit de son hôte durant ses quatre stades larvaires.


Il peut parfois, bien que ce soit rarissime, s’agir d’un vertébré endormi, que ce soit un petit mammifère comme un campagnol ou un plus gros comme une marmotte.

Il n’existe qu’un seul cas documenté d’un humain ayant été l’hôte des larves d’une rhysse : en Oregon, un homme faisant la sieste a été choisi comme hôte. Sa cuisse devenant de plus en plus sensible au fil des semaines, l’infortuné quidam s’est rendu en clinique médicale, d’où on a extrait les larves qui grouillaient dans la graisse de sa jambe.

J’ai capturé mon spécimen au Parc de la rivière Chaudière, à Lévis, avec un filet à papillons du Dollarama.



Mes spécimens exposés : une réussite et un échec (eh oui, ça arrive…)

Je suis spécialement content de la manière dont j’ai monté mon léthocère : je suis parvenu, avec une aiguille et des pinces à cils, à écarter les élytres et étaler les ailes. La bête a passé trois jours dans mon congélateur, fut ensuite laissée à dégeler tout un avant-midi, puis piquée sur du liège recouvert de papier. Je suis plutôt fier du résultat.    



Tout allait bien pour ma rhysse. J’étais vraiment fier, encore davantage que pour le léthocère. J’étais parvenu à placer ses cerques et son ovipositeur en posture de ponte. Puis j’ai refermé le cadre et j’ai entendu un horrible crounch !

Les taquets que j’avais placés pour laisser l’espace nécessaire à l’insecte n’étaient pas assez résistants. Alors voilà, ma rhysse a l’air d’avoir rencontré un pare-brise sur la 40…


Vraiment dommage. Je ne sais pas encore si je vais la garder. Probablement jusqu’à ce que je capture une nouvelle rhysse femelle, ce qui n’est pas demain la veille, car les rhysses adultes ne vivent qu’une vingtaine de jour… puis ça va à l’an prochain. Si vous avez la chance d’en croiser une.

Bref…

Je termine en vous souhaitant un bel été, de magnifiques baignades dans nos lacs et de reposantes siestes à proximités de nos boisés.


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