Je reviens sur les ammonites pour le volet « paléontologie » de décembre pour l’unique raison que je viens tout juste d’obtenir une nouvelle curiosité que j'ai hâte de montrer.
Pour l'obtenir, j'ai testé la célèbre « théorie des six poignées de main ». Cette théorie de Karinthy évoque la possibilité que toute personne sur le globe peut être reliée à n'importe quelle autre, au travers d'une chaîne de relations individuelles comprenant maximum six maillons. Autrement dit, si vous demandez à toutes vos connaissances de parler à toutes leurs connaissances qui parleront à toutes leurs connaissances… vous pouvez parvenir à Biden ou Poutine, ou n’importe qui d’autre, en six "poignées de main".
C’est un peu en testant cette théorie que je suis parvenu à
mettre la main sur un gros morceau d’ammolite (non, ce n’est pas une faute d’orthographe).
L’ammolite est une pierre précieuse (reconnue comme telle depuis 1981) obtenue
à partir des coquilles d'ammonite fossilisées trouvées dans une petite zone de
la formation de Bearpaw, une formation géologique du Crétacé supérieur dans le
sud de l'Alberta. Ces fossiles ont passé quelque 75 millions d'années sous
l'eau des glaciers et la pression tectonique, des conditions qui ont entraîné
le développement d'une coloration irisée, semblable à l'arc-en-ciel, qui
comprend le rouge, le jaune, le vert et le bleu.
Les coquilles fossilisées d’ammonites sont elles-mêmes
composées principalement d'aragonite, le même minéral contenu dans la nacre,
avec une microstructure héritée de la coquille. Il s’agit donc d’une des rares
pierres précieuses biogéniques ou autrement dit, une gemme issue de l’organique
plutôt que d’un minéral ; l'ambre et la perle sont d’autres exemples.
Tout cela est fascinant et ce n’est qu’en Alberta qu’une exploitation rentable est installée. Je désirais beaucoup obtenir un morceau d’ammolite — j’aurais préféré une coquille entière, mais ce fut impossible — alors j’ai commencé à tester la théorie de Karinthy.
Le cousin d’une amie avait travaillé sur le Plan Nord ; il
connaissait d’autres mineurs, l’un d’eux avait travaillé sur le chantier
albertain et m’a mis en contact avec un confrère qui y travaillait encore. J’ai
ainsi pu obtenir un éclat d’ammolite qui n’a pas la qualité pour être taillé en
gemme.
Bref, je n'ai eu qu'à payer pour les frais postaux et ce gentil monsieur a ramassé quelques morceaux qui trainaient sur le tas des "rejets" du chantier et me les a envoyé. Je ne garde pour moi que le plus beau (qui s'avère aussi être le plus gros) ; les quatre autres serviront de monnaie d'échange pour obtenir d'autres curiosités en marchandant avec des collègues cabinetiers, probablement Européens, où les chances d'obtenir de l'ammolite sont minces, et hors de prix.
En ce qui concerne mon échantillon, malheureusement, il est presque impossible de rendre l’éclat irisé en photo — mon morceau est principalement rouge, mais il y a aussi du vert, du jaune et un tout petit point bleu.
Un autre magnifique phénomène de fossilisation : la pyritisation
Une autre ammonite que j’ai en ma possession est « pyritisée »,
c’est-à-dire que le fossile est essentiellement constitué de pyrite de fer, ce
qui lui donne un éclat métallique brillant comme l’or (on se rappelle d’ailleurs
que la pyrite est surnommée « or des fous »).
Pour expliquer les grandes lignes du processus, disons que la
décomposition de la matière organique entraine la réduction bactérienne des
sulfates. Le bisulfite peut être partiellement oxydé ou peut réagir avec la
matière organique et les espèces métalliques réactives. Les minéraux de fer,
s'ils sont disponibles, entraînent la formation de sulfures de fer. Le sulfure
de fer le plus courant dans la pyrite.
Bref, lorsqu’un animal se décompose dans les conditions optimales,
son fossile sera constitué de pyrite.
Encore une fois, la photo ne rend pas justice…
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