Bonne année tout le monde !
En espérant qu’elle soit plus agréable que les trois
dernières…
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Premier du mois, je présente un crâne et je suis très enthousiaste
du spécimen que je vous montre aujourd’hui. Il s’agit du crâne d’un animal
asiatique qu’on vendait aux marchands occidentaux en les faisant passer pour
des crânes de dragons.
Entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, ces crânes ont fait la joie des cabinetiers qui les exposaient fièrement, souvent en compagnie de sculptures ou de gravures de dragons chinois.
Il faut admettre que la ressemblance est frappante ! On dirait vraiment le crâne d’une créature de légende.
Les naturalistes plus sérieux ont vite considéré ces « crânes
de dragon » comme le fruit d’un canular. L’essentiel de la dentition montre
qu’il s’agit d’un mammifère ruminant et la présence des bois trahi son appartenance
aux cervidés. Le consensus était alors que ces crânes venaient d’une petite
espèce de cerf et qu’on y forait des trous pour y insérer des crocs de loups ou
de chiens.
Les naturalistes n’étaient pas le tort en identifiant le cervidé, mais ils se trompaient en parlant de canular : en effet, il s’agit du crâne d’un cervidé qu’on nomme Muntjac de Reeves, dont le mâle possède deux bois le constitués d’un unique andouiller et de longues canines supérieures (d'environ 5cm). Il s'en sert principalement pour s'alimenter (en grattant le sol pour déterrer des racines par exemple).
C’est le naturaliste John Reeves qui fit connaître l’espèce en Occident, bien qu’on en croise des mentions ici et là dans des documents plus anciens — toutefois le lien entre « crânes de dragon » et muntjac n’avait jamais été établi jusqu’alors.
Introduit en Angleterre comme « animal décoratif »
pour les parcs privés, les muntjacs se sont évadés et ont peuplé les forêts
anglaises. Comme c’est généralement le cas lorsqu’on introduit une espèce
étrangère dans un écosystème qui n’est pas conçu pour elle, la situation est
vite devenue problématique : en Angleterre, le cervidé n'a pas de
prédateur. La population continue de croître (8,2 % en moyenne par an) et a atteint
aujourd’hui le million d’individus. Ces petits cerfs causent désormais d’énormes
ravages aux boisés et aux forêts, ce qui fait que l’État est contraint de
réguler la population par un abattage annuel pour éviter de détruire les
écosystèmes locaux.
C’est, vous l’aurez compris, de cette triste mais nécessaire
campagne d’extermination qu’est issu mon crâne de muntjac. De ce que j’ai lu, l’Angleterre
veille à ce que la viande de ces petits animaux soit utilisée, offerte par lots
aux industries d’alimentation canine. C’est mieux qu’un stupide abattage, mais
il aurait mieux valu, à la base, éviter d’introduire des animaux étrangers dans
un écosystème qui n’est pas le leur.
Mise à jour :
Oh boy ! Je ne pensais pas que le livre qui sert de
présentoir au crâne susciterait autant de courriels. (En passant, je rappelle
une fois de plus que vous pouvez commenter en bas, mais d’accord, je comprends
ceux qui sont gênés).
Alors on sort du sujet du blog, mais je n’ai pas vraiment
envie de répondre individuellement à tout le monde…
Donc, à propos de ce livre…
Oui, c’est le livre dont est tiré le Ciné-Cadeau
des années 80 « Le Vol des Dragons ». Ceux qui ont reconnu le trait
de l’artiste (et le titre !) ont bien vu.
The Flight of Dragons est une monographie d'évolution spéculative écrite par Peter Dickinson et illustré par Wayne Anderson, publié en 1979.
C’est un fort bel ouvrage qui figure très bien dans mon cabinet de curiosités, surtout une fois départi de sa jaquette que je préfère ranger, pour éviter de l’abimer.
Le livre est devenu plutôt rare et assez convoité par les collectionneurs du milieu de la fantasy. J’ai la chance d’en posséder deux exemplaires — je me garde le second comme « objet d’échange » pour le cabinet.
Mais revenons au film, comme c’est ce qui semble avoir
capté l’intérêt de tout le monde. Seuls l’esthétique, le titre et l’aspect « évolution
spéculative » de The Flight of Dragons ont servi à élaborer le film.
L’intrigue et les personnages du film sont tirés du roman Le Dragon et le
Georges de Gordon Dickson (à qui on doit aussi le cycle de SF Dorsaï).
La réponse à la grande question : Oui, le film est en DVD à distribution limitée, dans la série WarnerBros Archives. Non, la version française n’est pas incluse.
Finalement, pour les vrais fans, sachez que Dickson a donné
deux suites à son roman et, comme le film suit d’assez près l’intrigue du roman
(mais lisez-le quand même, il y a des variantes nécessaires à connaître), vous pouvez considérer qu’il
s’agit aussi de suites à l’histoire du film.
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